Le centre de tri brûle, agira-t-on?
Les incendies dans les centres de tri ont attiré grandement l’attention au cours des dernières semaines, particulièrement celui d’un centre de tri de matériaux de construction, rénovation et démolition (CRD) dans l’est de Montréal, qui a impacté la vie des résidants du quartier. Pourtant, il y a un an, Ricova alertait déjà les municipalités et le gouvernement avec son rapport Les piles au lithium dans le bac bleu, un mélange incendiaire!
Comment se fait-il qu’on parle tant des incendies de matières recyclables, de matières résiduelles ou de matériaux CRD mais que rien ne semble changer?
Des risques importants pour la santé et la sécurité de tous
Lors d’incendies dans les centres de tri, les résidents environnants souffrent des effets, comme la fumée, la présence de véhicules d’urgence de premiers répondants dans leur quartier et les risques à leur propriété. Pire encore, ces accidents mettent sérieusement à risque la santé, la sécurité, voire la vie des travailleurs.
Dans la quasi-totalité des cas d’incendie, ce sont des matières qui n’auraient pas dû aller au centre de tri qui enflamment les autres matières.
Si, il y a dix ans, on voyait un incendie dans un centre de tri une à deux fois par année, l’incidence de ceux-ci est passée au quadruple, soit quatre à huit incendies annuellement.
Ça ne va pas dans le bac… ça va où?
- Piles au lithium-ion
- Outils, tels perçeuse, scie, etc., qu’ils soient électriques ou alimentés au carburant
- Contenants et bidons de produits chimiques, tels les produits d’entretien d’une piscine ou spa
- Appareils électroniques, tels cellulaire, téléviseurs, calculatrices, ordinateurs, etc.
- Bouteilles de gaz propane
- Batteries automobiles et pièces automobiles
Outil sans-fil détruit par le feu.
Les centres de tri sont responsables de gérer les matières recyclables, pas les matières dangereuses. En plus des écocentres, qui sont équipés pour entreposer sécuritairement les matières dangereuses, plusieurs entreprises de valorisation des déchets électroniques proposent des points de dépôt un peu partout. Pour les trouver ou savoir comment vous débarrasser d’objets qui pourraient potentiellement causer des incendies, des dommages aux camions ou équipements de tri ou même blesser sérieusement un travailleur, consultez l’application Ça va où? de Recyc-Québec.
Des incendies facilement évités… avec une bonne information
Un feu, de toute évidence, requiert trois éléments : un combustible, une source de chaleur et de l’oxygène (comburant). Pour démarrer une combustion, le combustible doit être exposé à une source de chaleur suffisante pour atteindre sa température d’ignition.
Aujourd’hui, 90 % des incendies dans les centres de tri de matières recyclables sont causés par les piles au lithium-ion, qu’on trouve dans d’innombrables objets de la vie courante : outils, petits appareils électroniques avec ou sans fil et autres.
Lorsqu’écrasés par la machinerie des centres de tri ou des camions de collecte, ces objets risquent de créer des flammèches, surchauffer, même s’enflammer.
Mettre ces objets au bac bleu, c’est donc placer une source de chaleur potentielle directement en contact avec un combustible, soit le papier, carton, plastique que vous mettez aussi au bac de recyclage.
Le saviez-vous?
L’inaction a des conséquences
Car c’est là que le bât blesse. Après que Ricova ait rassemblé les grands centres de tri de matières recyclables du Québec dans une grande initiative de sensibilisation, les décideurs ne sont pas passés à l’action.
Ricova et ses partenaires ont pourtant mis à la disposition de leurs clientes, les municipalités, un rapport détaillé, des recommandations solides et des outils pour réduire ces risques à la vie humaine et ces dommages aux infrastructures, les villes qui ont agi sont peu nombreuses.
Il y aura bientôt un an et plusieurs incendies mineurs et majeurs de centres de tri plus tard, il est de mise de rappeler les recommandations émises par les opérateurs de triage de matières recyclables québécois :
- Mettre sur pied un programme de sensibilisation à grande échelle par les autorités provinciales et municipales pour rejoindre directement la population.
- Installer un autocollant sur tous les bacs de récupération, avec un pictogramme visible, visant l’interdiction d’y déposer les matières dangereuses, comme les piles, contribuant, du coup, à minimiser un grand nombre de rejets par méconnaissance du risque.
- Faciliter et rendre accessible le processus de recyclage des matières dangereuses pour le citoyen, du début à la fin.
- Impliquer les producteurs de matières dangereuses dans la gestion du risque que créent leurs produits pour la santé et la sécurité de la population et des travailleurs, notamment dans les centres de tri. Encourager des gestes tels que l’adoption d’un symbole unique à mettre sur les contenants interdisant le dépôt dans le recyclage du produit, une participation financière aux campagnes de sensibilisation de la population de même qu’aux filières de captation et de traitement de leurs produits en fin de vie.
Un appel renouvelé à collaborer
L’élimination du risque à la source est la solution la plus simple et efficace.
Malheureusement, cette élimination est impossible à réaliser par les centres de tri eux-mêmes, en raison de la rapidité et de la complexité des procédés opérationnels.
Ces installations ont besoin d’un soutien des organisations municipales et provinciales afin de minimiser les impacts causés par ces piles jetées par négligence et méconnaissance dans les bacs de récupération.
Il y a donc urgence d’agir pour protéger la santé et sécurité des employés, ainsi que protéger les installations des centres de tri du Québec. Le nombre d’incendies qui sont causés par les piles au lithium sera en progression constante si des mesures provinciales strictes ne sont pas adoptées rapidement.